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On vous présente : Maude Audet

Maude Audet, de la soie pour les oreilles


© Flamme

Par : Myriam Bercier

MatTv vous offre encore et toujours la chronique On vous présente, qui a pour objectif de vous présenter des artistes qui passent sous le radar de la musique populaire. Cette semaine, on vous présente Maude Audet.

Maude Audet est une autrice-compositrice-interprète originaire de Charlesbourg. Son premier album, Nous sommes le feu, a vu le jour en 2015. Elle sort son deuxième album Comme une odeur de déclin en 2017 réalisé par Ariane Moffatt et gagne le prix Album folk de 2018 au Gala alternatif de la musique indépendante du Québec (GAMIQ). Elle a également pris part à de nombreux concours, comme la 43e édition du Festival international de la chanson de Granby, Vue sur la relève et les Francouvertes. On peut la voir sur scène interpréter ses pièces seule lorsqu’elle fait les premières parties des Soeurs Boulay ou de Saratoga. Lorsqu’elle est la tête d’affiche, elle fait ses spectacles à deux avec le multi-instrumentiste Mathieu Charbonneau, qui a également réalisé son plus récent album.


© Gaëlle Leroyer

Le 7 février 2020, Maude Audet lance son plus récent album, Tu ne mourras pas. Le son qu’on y trouve est davantage folk-pop orchestral, alors que sur ses derniers albums, on pouvait sentir une certaine influence grunge. On peut y sentir des notes des années 1960-70, de Simon Garfunkel ou des Sœurs McGarrigle. Anna Frances Meyer, du groupe les Deuxluxes, y joue de la flûte alors que les arrangements de cordes sont signés par Marianne Houle. Le titre, Tu ne mourras pas, évoque une multitude de deuils, petits et grands, que l’artiste aborde dans ses textes. Il s’agit d’un album à la fois personnel et universel. Sa plume aborde des émotions importantes sans les exagérer, comme notamment Les gelées de novembre qui évoque un monde qui évolue, la famille qui vieillit, les enfants qui grandissent, emplissant d’une part les parents de fierté mais d’autre part de tristesse de les voir bientôt partir. La pièce éponyme de l’album aborde le temps qui passe, les gens, les relations et les choses qui disparaissent mais qui restent vivantes par la pensée, dans le cœur. Finalement, dans la chanson Nos bras lâches, Maude Audet pose la question «le pardon peut-il effacer les regrets?»

Je me suis entretenue avec Maude Audet afin de parler de la famille, de faire des spectacles à deux et du temps qui passe. Fait à noter, elle fera un spectacle virtuel le 31 juillet à 20h30 en direct de l’Anti de Québec. 

Myriam : Qu’est-ce qui t’a amené à faire de la musique?
Maude : C’est vraiment en fait mon amour pour la musique depuis que je suis toute petite j’en écoute beaucoup, je pense que j’ai l’oreille dans le sens que … j’ai toujours été intéressée par ça, de plus en plus quand j’étais adolescente. Malgré ça, j’ai comme fait des études en d’autre chose, j’ai travaillé un peu dans un autre domaine. Un moment donné je suis arrivée dans ma vie je me suis dit «non, je pense qu’il faut que j’écoute mes rêves, mon cœur». De fil en aiguille je me suis orientée vers la musique et je me sens vraiment sur mon X.

Myriam : C’est ça, tu étais conceptrice de décors avant, qu’est-ce qui t’a fait changé de carrière pour te lancer dans la musique?
Maude : En fait j’avais une formation de scénographe et je faisais plus de la conception de costumes, donc j’étais vraiment déjà dans le milieu culturel, je travaillais dans les arts, j’étais une créatrice, mais c’est ça. J’avais vraiment envie de créer et un moment donné, à temps perdu, je me suis mise à composer des chansons, à chanter, à gratter un peu parce que je jouais déjà de la guitare depuis que j’étais adolescente mais j’étais très amateur on ne se le cachera pas! (rires) J’ai comme réalisé à quel point j’avais du plaisir à faire ça, j’ai eu envie que ça devienne très sérieux. Bien sûr, ça s’est fait graduellement, c’est pas du jour au lendemain, je n’ai pas tout arrêté, mais comme je travaillas à contrat, j’ai commencé graduellement à mettre du temps dans mon agenda pour la musique jusqu’au jour où je n’ai plus eu le temps de prendre du temps pour le théâtre parce que la musique m’occupait trop, la transition s’est faite comme ça.

Myriam : Qu’est-ce qui t’inspire le plus pour composer?
Maude : Je pense que je suis très alerte à ce que je vis, à ce que les autres autour de moi vivent, à l’ère du temps bien sûr. Je suis quelqu’un qui prend son temps pour composer. Tous les artistes ont leur façon de faire, leur démarche, il y a des gens qui vont aller en résidence pendant un mois et qui vont écrire 15 chansons, ce qui est très très très correct, moi j’ai un processus différent, j’ai besoin de vivre des choses, souvent j’écris un album sur une période de peut-être un an, un an et demi. J’aime ça avoir du recul sur mes textes pour voir où je suis. Souvent, il y a un thème général à un album, mais j’aime quand même pouvoir toucher à quelques sujets. Donc je dirais que c’est ma vie en général qui m’inspire.

Myriam : Sur le site de ta maison de disque, Grosse Boîte, on peut lire «L’amour des siens qu’elle chérit près du lac en été, emmitouflés dehors l’hiver ou simplement autour d’une belle tablée, la propulse vers la création d’un son folk, pop vintage, aux légers accents psychédéliques pour Tu ne mourras pas, son troisième album en carrière.» Qu’est-ce que tu entends par là?
Maude : J’entendais un peu ce que je viens de te dire dans le fond. Oui, ma famille, mes amis, tout ça, la nature c’est des choses au cœur de ma vie, je suis plus comme dans cette vibe-là pour composer. Oui mes influences c’est la musique que j’aime, que j’écoute, que j’ai écouté, c’est sûr que je peux écouter de la musique qui ne ressemble pas du tout à ce que je fais, je pense que c’est sain et c’est normal de s’intéresser à autres choses, mais bon après c’est sûr qu’il faut choisir ce qu’on a envie de faire. Ce descriptif-là c’est vraiment pour résumer mes moteurs à moi.

 

Myriam : Les deux albums avant Tu ne mourras pas avaient des influences grunge alors que celui-ci est bien campé dans le folk-pop, qu’est-ce qui explique ce changement de style?
Maude : En fait, je sais pas, le folk je trouve qu’il a le dos large, dans le sens que moi… oui je compose à la guitare, et j’ai l’impression que dès qu’on a une guitare, nos projets sont catalogués «folk». J’adore la musique folk là, c’est clair! Mais je pense pas non plus que mon projet… le folk a toujours été présent dans les racines de ma musique parce que je suis une autrice-compositrice et c’est ça la base de mon art, d’écrire des chansons et dire des choses. Après ça, oui, dans le dernier album, il y avait peut-être plus de guitare électrique, mais c’était pas non plus un album très grunge. Des fois, il y a des journalistes qui vont ressortir ces caractéristiques-là parce que ça fait partie de influences mais on s’entend que c’était très loin du Nirvana, tu comprends ce que je veux dire hein? Donc oui il y avait des petites sonorités des fois, mais il y avait quand même des influences sixties qui étaient déjà présentes dans mes deux derniers albums, des influences folk aussi. Là je pense que dans Tu ne mourras pas, le folk est encore là, et les influences vintage ont été plus présentes, plus mises de l’avant, à cause de la vibe que ces chansons-là m’inspiraient. Ça fait trois albums que j’ai des arrangements un peu orchestraux, des instruments à cordes, des instruments à vent, c’est quand même quelque chose qui était là, qui m’habitait, mais là c’est peut-être plus en surface qu’avant.

Myriam : J’ai cru comprendre qu’avant que la COVID ne les empêche, tu faisais tes spectacles à deux, avec Mathieu Charbonneau, pourquoi ce choix-là? Pas de personne, mais pourquoi les faire à deux?
Maude : Dans mes albums, il y a beaucoup d’arrangements, pour pouvoir jouer une chanson des fois telle qu’elle est composée, il faudrait 12 ou 13 personnes sur scène, ce qui est absolument impossible, et ça je pense que c’est le cas de pas mal tout le monde dans l’industrie de la musique à moins d’avoir des projets très électro ou hip hop qui font qu’on travaille plus avec des séquences, mais les gens qui font de la musique un peu plus organique comme moi avec «des vraies personnes» si je peux me permettre l’expression, on a toujours des deuils à faire quand on monte un spectacle : «Bon, ok, on n’aura pas les cordes, on n’aura pas telle chose, on n’aura pas telle chose» que même quand on est quatre personnes déjà on fait beaucoup de concessions. Ce qui m’a amené à faire ça en fait c’est que cet album-là est plus doux, plus intimiste et je trouvais que de le faire à deux, aussi il faut dire que je suis accompagnée d’un multi-instrumentiste très très talentueux qui est capable de faire plein de choses, ça façonne quand même. Oui il y a quelque chose de dépouillée dans la formule, mais il y a quand même des arrangements qu’on est capable de faire à deux. Tout ça nous permettait d’avoir des meilleures conditions de travail parce qu’on le sait que l’industrie de la musique, on n’est pas dans des périodes très très fastes, des fois tourner à quatre c’est très très difficile pour les conditions de travail, pour ce qu’on peut offrir aux gens. Donc c’est un peu l’ensemble de ces choses-là qui m’a amenée à faire le show en duo, mais avant tout, artistiquement, c’est parce que ça se prêtait bien à cet album-là aussi.

Myriam : Sur la dernière pièce de ton dernier album, tant de ciels, on entend tes enfants parler. Pourquoi conclure ton album ainsi?
Maude : Parce que la pièce d’avant, qui s’appelle Les gelées de novembre, c’est vraiment une chanson que j’ai écrite pour mes enfants et c’est une chanson qui parle du temps qui passe, du fait qu’un jour je vais être confrontée au fait qu’ils quittent mon quotidien parce qu’éventuellement ils vont voler de leurs propres ailes, avoir leur vie à eux et partir de la maison. Mes enfants sont encore jeunes, mais ce ne sont pas des petits bébés, j’ai un ado et un préado, donc c’est quelque chose que je vois de plus en plus dans un avenir moyennement rapproché si on peut dire. C’est vraiment de ça que cette chanson parle, et je trouvais ça beau de conclure avec un souvenir de leur enfance même si c’est encore des enfants, de montrer que le temps a passé en fait.

1. Ton lecteur de musique plante sur une île déserte, tu peux seulement écouter une chanson, c’est laquelle?
Je crois que n’importe quelle chanson finirait par me rendre folle! haha
2. Ta chanson de rupture préférée?
Je suis en couple depuis très longtemps donc je n’en ai pas! Mais ma musique préférée pour être triste est celle de Leonard Cohen.
3. Ta chanson d’amour préférée ?
Parlez-moi de lui de Françoise Hardy 
4. Un.e artiste que tu aimerais que les gens connaissent davantage ?
Catherine Leduc
5. Si tu pouvais écouter un seul album pour l’année à venir, ce serait lequel?
En ce moment je dirais «Boîte aux lettres» de Les Hay Babies
6. La chanson qui te rend le plus heureux ?
La musique de Roy Orbison
7. Un.e artiste / groupe qui t’inspire beaucoup ?
Les albums de Nancy Sinatra et Lee Hazlewood
8. La chanson qui t’obsède en ce moment?
Une reprise de la chanson Walls de Tom Petty, interprétée par Angel Olsen et Hand Habits. C’est simple comme tout mais très réussi. Ça fait une dizaine de fois que je l’écoute en 2 jours.
9. Une chanson que tu aimerais avoir écrite?
Evidemment de France Gall
10. Ta chanson (à toi) préférée?Je suis assez fière de Demande-moi