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L’altérité familière au cœur de la pièce « Mille » au Quat’Sous

« Mille » : entre l’oralité et la calligraphie des traces perdues et retrouvées

Crédit photo : Fabrice Gaëtan

Par : Annie Dubé

La pièce s’appelle Mille, mais détrompez-vous, elle est comme pas une. Jusqu’au 25 mars sur la scène du Quat’Sous, ce texte signé par Olivier Kemeid et mis en scène par Mani Soleymanlou, brille joliment. Comme la flamme d’une bougie dans le noir de ce qui est venu avant, qui brûle comme un mystère de l’inconscient entre le réel et l’invention, nous errons ensemble au fil du vent qui fait tomber les feuilles de nos saisons.

La magnifique actrice Monique Spaziani tient une place centrale dans cette pièce dont elle et son histoire sont les muses. Accompagnée par l’amusante Philomène Bilodeau et le passionnant Robert Polka, sans oublier trois musicien.e.s qui occupent eux aussi la scène, Spaziani et ses complices nous offrent un voyage au fond de l’histoire, avec un grand et un petit H.

Crédit photo : Fabrice Gaëtan

Se raconter entre soi

Avec une mise en scène toute simple qui utilise l’espace de manière minimaliste, on va au bout du monde. Simple, oui, mais jamais sans grandeur, car rien n’est simple dans ce que Mille raconte : les origines mystérieuses et complexes d’un personnage qui est à l’origine de tous les autres.

Crédit photo : Fabrice Gaëtan

On passe par des moments de frissons grâce à la splendide musique et aux chants d’origines juives qui rythment chacune des pages de ce texte. Une sorte de poésie sans métaphore s’empare alors de l’air ambiant. Nous sommes dans une grande psychanalyse familiale et sociale, passant de l’Holocauste à la vie d’agent secret; on rit en passant d’une version d’un souvenir à celui contraire d’un autre. Comme quoi on ne connait jamais vraiment qui que ce soit, mais au moins, on travaille à explorer une identité, des identités, à recoller à partir de ces pages déchirées, hors de toute linéarité.

Simplement, voilà une grande histoire, racontée d’une main de maître, avec un fort rapport à la parole, à l’audition, à la musique, et parfois aux morceaux de photos et d’archives. Un beau mélange, qui nous perd, qui nous trouve. Un trésor.

Crédit photo : Fabrice Gaëtan

Je ne sais pas comment vous le dire, mais il y a quelque chose comme une belle légende qui voyage d’une bouche à l’oreille, et qui défile comme une étoile filante au-dessus du Quat’Sous. Comme quoi même depuis les contes des Mille et une nuits, l’Humain sait raconter des histoires à dormir debout, encore et toujours, pour tisser un réel chemin en soi, hors de soi. Et entre nous.

 

Texte: Olivier Kemeid

Mise en scène : Mani Soleymanlou

Inspiratrice : Monique Spaziani

Interprétation : Philomène Bilodeau, Robert Polka, Monique Spaziani

Interprétation (musique) : Eden Glasman, Zafer Mamilli, Damian Nisenson, Steve Raegele, Jean-Sebastien Williams

Assistance à la mise en scène : Jean Gaudreau

Dramaturgie : Chloé Gagné Dion

Lumières : Chantal Labonté

Costumes : Cynthia St-Gelais

Conception sonore : Larsen Lupin

Compositeur : Josh « Socalled » Dolgin

Décor : Simon Guilbault

Conception video : Mathieu Roy

Maquillage et coiffure : Sylvie Rolland Provost

Accessoires : Fany McCrae

Crédit de couverture : Fabrice Gaëtan

 

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