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Le Concerto pour violon de Brahms avec l’OSM émeut les spectateurs

Zimmerman marque Montréal en compagnie de l’OSM

Rafael Payez
Crédit photo : Antoine Saito

Par : Annie Dubé

Frank Peter Zimmermann était l’invité de l’OSM, après des années d’absence. Maintenant, il faudra qu’il revienne, parce que le public présent mardi soir ne l’oubliera pas de sitôt. Le Concerto pour violon des Brahms aura laissé peu de gens indifférents lors de ce moment magistral à la Maison symphonique de Montréal.

Comme toujours, j’en ai profité pour tomber dans des rêveries, et vous rapporter les images qui me sont venues à l’esprit en passant par mon canal auditif. Comment raconter un concert spectaculaire, quand notre seul instrument est un crayon, pour accompagner l’orchestre en silence? En poésie, évidemment!

Je ne sais pas ce qui fait de Zimmerman un virtuose. Est-ce son doigté plein de dextérité? Est-ce la passion qui habite son corps entier et qui moule son visage aux yeux fermés? Je ne saurais dire la recette pour devenir un soliste plutôt qu’un membre d’un orchestre d’élite. La différence tient peut-être beaucoup à la chance, peut-être aussi à l’âme. Mais d’abord, voici un compte-rendu des deux pièces qui ont précédé l’arrivée sur scène du musicien allemand.

chef d'orchestre
Crédit photo : Antoine Saito

Brahms, Ouverture tragique, op. 81 (13 min)

C’est le début d’une route vers une grande aventure. Avec l’orchestre, nous dévalons les collines sinueuses de la montagne symphonique vers un printemps de cordes. Il pleut des cordes dans nos oreilles. Payare, magicien fou! Heureusement qu’il ne se coince pas le dos en se penchant attentivement avec complicité au-dessus de ses musiciens.

On s’enligne vers un grandiose coucher de soleil estival. Le premier violon est en feu sur son siège. Des cuivres soudainement portent encore plus loin l’envolée des violons. Puissant zigzag sonore.

Emilie Mayer, Symphonie no 7 en fa mineur (30 min)

Dramatique, puissante pièce, qui nous fait virevolter comme des cerfs-volants. Des papillons, serpents et échelles. Une glissade qui remonte le courant. Fin d’un mouvement.

Solennelle tendresse, embrassade d’une édifiante mélodie humaine, c’est une balade pour nos oreilles qui se passe avec l’OSM à ce moment.

violoniste
Crédit photo : Antoine Saito

Début d’un dernier mouvement : soubresauts de sourcils de la part d’un altiste qui ressemble à Hugh Grant. Les clarinettes se font troubadours. Trame narrative de suspense, vers une explosion des sens! Génératrice à rêveries, cette grandiose finale de maîtres du monde, à la main tremblante, épate.

Brahms, Concerto pour violon en ré majeur, op. 77 (38 min)

Nous y voici. Ah ben, coudonc. Dès les premières notes de ce moment-événement, une puissante nuée de vapeur sonore. Transe aveugle du musicien sans partition, voilà un soliste méditatif qui a la corde sensible.  Zimmerman est bien là, partout. On dirait l’enfant dans le film du Violon rouge, s’il avait survécu au passage des siècles. Réincarné, le prodige. Sa fougue fait vibrer sa joue, il est habité par l’instrument qu’il joue. Holistique, sa manière de manier les notes en communion avec l’ensemble. Finesse hypnotisante, un grand soin pour l’âme.

OSM
Crédit photo : Antoine Saito

Summum de trépignements sur lui-même, ce musicien est connecté à un réseau 5 G céleste, c’est le sublime de l’expérience vivante. On vogue sur la mer invisible de la partition par cœur avec lui, qui nous guide plus loin encore que les portées gravées sur des feuilles noires et blanches.

La foule est debout, ne cesse d’applaudir. On ne voit pas souvent des rappels à l’OSM, à ma connaissance. Il en a fait deux, seul. L’OSM était pendue aux lèvres de son archet. Mon accompagnatrice me fait remarquer le grand sourire sur la bouche d’un des violoncellistes. Il est heureux comme jamais. Quelle joie se lit sur son visage, euphorie de présence. Une violoniste a un regard ébahi, c’est son Ave Maria sans paroles. Il joue Le roi des Aulnes de Schubert, puis Sarabande en si mineur de Bach.

OSM Musiciens
Crédit photo : Antoine Saito

Est-ce que c’est exceptionnellement parfait, objectivement ? Qui sait. C’est un bonheur de l’entendre et de ne pas savoir ce qui est une fausse ou une vraie note. Un grand moment de vérité sur scène. On en prendrait plus encore.

À ne pas manquer pour la dernière fois ce 2 mai, les billets sont sur le site Web de l’OSM.

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