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Proje(c)t; les bonnes : Une colère sociale oubliée

Le retour contemporain de Jean Genet

Crédit photo : Phanie Ethier

Par : Hanieh Ziaei

La Chapelle Scènes Contemporaines revisite un grand classique du théâtre, Les bonnes (1947) de Jean Genet avec une belle prouesse linguistique, cette pièce de théâtre devient trilingue et se joue alors simultanément en trois langues (français, anglais et espagnol).

Une adaptation libre qui nous plonge dans une histoire complètement transposée dans un contexte montréalais de deux sœurs québécoises (Claire et Solange), travaillant comme servantes au service d’une bourgeoise canadienne anglaise de Westmount, surnommée Madame

Crédit photo : Phanie Ethier

Un double jeu est alors offert au public, un jeu dans le jeu, le théâtre dans le théâtre. Les deux sœurs jouent, fabulent et se plaisent à surjouer le rôle de Madame, entre moquerie, révolte et délire.

La mise en scène du meurtre du maître passe d’un jeu de rituel dangereux à la volonté de tuer ! Claire et Solange partent d’une véritable colère sociale pour parvenir à l’acte d’exécution mais sans atteindre leurs objectifs visés. Le drame se retourne alors contre elles-mêmes et contre leur propre condition. 

Crédit photo : Phanie Ethier

Ce classique du théâtre porte pourtant en lui tant de questions actuelles: le rapport de force et de pouvoir; la servitude des temps modernes, la question des classes sociales, la dialectique du maître et de l’esclave de Hegel ou encore les tensions linguistiques (particulièrement au Québec et à Montréal, entre francophones et anglophones).

Aussi bien Jean Genet que cette nouvelle adaptation libre traversent les époques, en l’occurence ici, de la Grande Dépression à la postmodernité montréalaise en passant par les enjeux contemporains. Le spectateur peut parfois ressentir un malaise, un décalage voir une anachronie mais avec une constante tragédie de la condition humaine, à l’image de nos sociétés actuelles.