Voyage en Rome antique au Musée des Beaux-arts de Montréal
©Courtoisie Musée des Beaux-arts de Montréal /Vue aérienne des ruines de Pompéi avec le Vésuve à l’horizon Photo © Roger Ressmeyer /CORBIS
Par: Maude Nadeau
24 août 79 après J.-C. Le Vésuve entre en éruption, recouvrant de tonnes de pierres ponces, de cendres et de lave la ville italienne de Pompéi, située aux abords du fleuve Sarno. La prospère et opulente ville n’est plus. Mais, sous les noires cendres se cachent, jusqu’à leur découverte au XIXe siècle, des artéfacts de la vie quotidienne et autres trésors presque miraculeusement intacts. Depuis février et jusqu’au 5 septembre, le Musée des Beaux-arts de Montréal offre aux visiteurs férus d’histoire et d’art un parcours thématique immersif et rigoureusement documenté à travers les splendeurs de la cité disparue.
De la place publique au foyer
L’exposition se divise en sept salles couvrant chacune un aspect de la vie des Pompéiens, passant du domaine public aux sphères plus privées. À la fin du parcours, une petite pièce parallèle à la dernière salle présente deux documentaires pour les visiteurs souhaitant un complément d’information. L’un porte sur le Vésuve et son éruption du 18 au 23 mars 1944 et le second retrace étape par étape l’éruption de 79 après J-C.
La première salle campe le décor et donne l’information nécessaire pour situer la ville et l’époque. La seconde porte sur le marché. L’ambiance est recréée par une trame sonore où l’on peut entendre la mer et des chevaux. Avec les visiteurs qui déambulent, on se croirait presque un jour de marché dans le port de la ville. Plusieurs objets liés au commerce sont exposés comme des amphores (récipients de forme allongée pour les liquides ou les grains) ainsi que des outils et même une moitié de pain carbonisée!
Crédit photo:©Courtoisie Musée des Beaux-arts de Montréal: Moitié de pain carbonisé, Charbon,Pompéi, Museo Archeologico Nazionale di Napoli (mann)
L’éclairage, doux et bien dirigé, met en valeur les objets et surtout la statuaire de bronze ou de marbre en créant d’agréables jeux d’ombres et de lumière accentuant la finesse des reliefs et la pureté des détails. Le reste de la scénographie est simple et épuré, les objets bien conservés et les fresques d’un dessin précis et aux couleurs éclatantes, considérant leur âge (plusieurs siècles) et les conditions dans lesquelles elles se trouvèrent (ensevelies sous les cendres). Tous ces éléments n’ont pas besoin d’une mise en scène complexe pour être appréciés. Ils se suffisent en eux-mêmes.
La troisième salle porte sur les loisirs: combat de gladiateurs, musique, théâtre. Les cartels (fiches descriptives sous les oeuvres) sont souvent fort instructifs sans être lourds ou lassants. L’information donnée est précise et agrémente la visite. Elle plaira surtout aux amateurs d’histoire. On y retrouve, par exemple, le prix d’un esclave, la biographie de la personne représentée par la fresque ou la statue ou encore les différents types de gladiateur. Une pièce en retrait au fond de la troisième salle présente des artéfacts à saveur érotique courants et non provocateurs pour leur époque malgré leur caractère explicite que le visiteur curieux pourra découvrir à l’abri des regards.
Crédit photo:©Courtoisie Musée des Beaux-arts de Montréal: Casque de gladiateur,Bronze,Herculanum, caserne des gladiateurs, Museo Archeologico Nazionale di Napoli (MANN)
Les quatrième, cinquième et sixième salles nous amènent dans l’intimité des citoyens en présentant la maison, la cuisine et les jardins. Comme pour la place du marché, l’ambiance est recréée par l’ajout d’une trame sonore reproduisant la musique d’un banquet dans la cinquième salle et la nature dans celle du jardin. Dans cette pièce, des oiseaux et des arbres sont projetés sur le mur du fond pour redonner la sensation de se trouver à l’extérieur. L’ensemble est très réussi. Les oeuvres les plus impressionnantes de ces trois pièces sont sans équivoque les fresques et les mosaïques représentant la vie de l’époque ou la nature. Le travail des artisans est minutieux, le dessin précis et certaines mosaïques semblent être des peintures tant elles sont raffinées.
Crédit photo:©Courtoisie Musée des Beaux-arts de Montréal: Portrait de femme,Mosaïque, Pompéi, dans une maison,Museo Archeologico Nazionale di Napoli (MANN)
Memonto mori: souviens-toi que tu es mortel
La dernière pièce, en deux parties, est un des points forts de l’exposition. Dans la première partie, une éruption volcanique est projetée sur trois des quatre murs, immergeant complètement le visiteur. Un moulage d’un corps de chien dont on entend les jappements occupe le centre de la pièce. Les bruits de la catastrophe naturelle emplissent les oreilles. D’ailleurs, on les entend déjà de la pièce précédente, celle du jardin. Autant que cela puisse être agaçant, cela agit aussi comme un rappel que la légèreté de la vie que l’on ressent dans chacune des salles exposant la vie des Pompéiens est fragile et peut, comme ce fut le cas, être anéantie.
La deuxième partie de la dernière salle table encore davantage sur ce contraste entre la légèreté de la vie et la mort puisqu’y sont présentés des moulages de corps de victimes. En tombant, la cendre a collé aux vêtements et à la peau, figeant les gens au moment de leur mort. En se décomposant, les corps ont laissé derrière eux des cavités, qui ont été remplies de plâtre afin de garder la trace des individus. Heureusement, des 15 000 à 20 000 habitants de la ville, seulement 1000, selon les estimations, seraient morts. Les autres auront pu s’enfuir. Saisissant de réalisme, ces instantanés du dernier moment de la vie d’individus réels ne laissent aucun visiteur indifférent. On en ressort ébranlé, songeur.
Crédit photo:©Courtoisie Musée des Beaux-arts de Montréal: Fresque représentant une distribution de pain, Enduit peint, Pompéi, tablinum de la maison du Boulanger, Museo Archeologico Nazionale di Napoli (mann)
Bref, que l’on soit amateur d’art ou d’histoire, l’exposition Pompeii du Musée des Beaux-arts de Montréal a de quoi plaire à tous, petits et grands. C’est une exposition splendide, bien réalisée et fort instructive, à voir et à revoir tout l’été et jusqu’au 5 septembre.
Texte révisé par : Marie-Claude Lessard