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On vous présente : Comment Debord?

Comment Debord, l’essence même de l’énergie de gang


© Comment Debord, crédit photo : Jean François Sauvé

Par : Myriam Bercier

Ma chronique On vous présente est de retour pour l’année 2021! En guise de rappel, On vous présente vise à vous faire découvrir des artistes qui passent sous le radar de la musique populaire. Cette semaine, c’est au groupe Comment Debord qu’on s’intéresse.

Comment Debord est un septuor québécois formé de Rémi Gauvin (voix, guitare, piano), Karolane Charbonneau (guitare électrique et voix), Olivier Cousineau (batterie et voix), Étienne Dextraze-Monast (basse et voix), Willis Pride (claviers et voix), Alex Guimond (voix) et Lisandre Bourdages (percussions et voix). Ce nombre impressionnant de musiciens explique l’énergie de gang qui coule dans chacune de leurs chansons. En effet, Comment Debord donne l’impression à ses auditeurs d’être avec ses amis autour d’un feu par une belle nuit d’été. Ce groupe formé en 2016 offre un rock à texte groovy et décontracté s’inspirant des années 1970.


© Comment Debord, crédit photo : Jean François Sauvé

Le 4 septembre dernier, le groupe a sorti son premier album homonyme enregistré en piste directe pour recréer l’effet et l’énergie organique de la scène. Ils ont pu faire le lancement de cet album en vrai au Village au Pied-du-Courant le 2 septembre dans le cadre de l’événement Plage Musicale. Cet album offre un mélange de chansons qui bougent, comme Bay Window chantée par une Alex Guimond qui semble briller plus fort que le soleil, des chansons où les termes « la dynamique du groupe » prend tout son sens comme Chandail principal qui dénonce notamment le manque de tolérance et d’ouverture des gens (« le monde qui pense que le monde qui pense pas comme eux c’est des cons; c’est des cons. » ) ou encore des pièces plus introspective et planante comme Mots d’Église qui offre une réflexion sur la vie de bohème et le syndrome d’imposteur ( « J’vais pas t’faire accroire que je trouve ça jamais difficile / De faire semblant devant vous autres / Que toute va ben / Des jobbers-compositeurs comme moé / J’en connais plein y’en a / Quarante-mille facile s’a rue Beaubien »)

J’ai pu parler avec Rémi Gauvin, le chanteur du groupe, le mardi 12 janvier dernier. Nous avons discuté notamment de leur nom de groupe, de leur processus de création à sept (!!), de l’impact de travailler avec Audiogram et du dernier disque d’Antoine Corriveau. Sans plus attendre, voici l’entrevue!

Myriam : Qu’est-ce qui t’a amené à faire de la musique?
Rémi : J’ai fait un peu de musique classique quand j’étais jeune, je jouais du violoncelle. Ça a été ça, l’initiation. J’ai toujours écouté beaucoup de musique aussi. Il y avait de la musique qui jouait pas mal chez moi, des CD de Tracy Chapman et de Leonard Cohen, c’est de bons souvenirs pour moi. Au secondaire, je me suis acheté une guitare et j’ai commencé à faire des trucs plus folk et tranquillement je suis allé plus vers le rock.

Myriam : Comment le groupe s’est-il formé?
Rémi : Au départ c’était moi, Étienne le bassiste et Olivier le batteur. J’avais des idées de chansons en français, je voulais monter un groupe. Tout simplement je les ai appelés, on est allés prendre une bière au Snack N’ Blues qui est un bar sur Saint-Laurent, un bar que j’aime bien. C’est là que ça a commencé, je leur ai demandé s’il voulait faire un groupe, ils étaient partants, on a commencé à jammer dans le sous-sol des parents d’Olivier sur la Rive-Sud.

Myriam : Pourquoi avoir choisi le nom de Comment Debord?
Rémi : Il y a plusieurs trucs. C’est une espèce de question qui amène à une réflexion générale, genre on fait comment debord? […] Il y a une certaine dose d’absurdité qui est un peu à l’image de nos textes puis c’est très québécois comme expression, comment debord. […] Pour la petite histoire, avant on s’appelait Phénix Leclerc et on se disait qu’on devait se trouver un nom un peu plus sérieux si on voulait être un peu plus sérieux dans nos activités (rires). Pendant longtemps on s’est demandé on allait s’appeler comment, puis à un moment j’ai demandé « on va s’appeler comment debord? » et c’est resté. (rires)

Myriam : Qu’est-ce qui vous inspire pour créer une chanson?
Rémi : Ça dépend vraiment. Au niveau du son, on s’inspire de plein de trucs, mais beaucoup de la musique des années 1970 de manière générale. Autant dans le rock que dans les trucs plus folk ou funky ou du disco parfois, du country-rock aussi je te dirais, les trucs qui sont plus organiques… On aime la musique de gang, la musique qui est enregistrée en live. C’est ça qu’on essaie de partager comme ambiance. Ça, c’est pour les arrangements et la composition je te dirais. Sinon, au niveau des textes, c’est moi qui écris les textes. C’est sûr que j’ai des chouchous au Québec, je suis un gros fan de Stéphane Lafleur [chanteur du groupe Avec pas d’casque] par exemple, on tripe sur Richard Desjardins, Jimmy Hunt… en même temps j’adore la chanson française, je suis fan de Gainsbourg, j’en écoutais beaucoup beaucoup. Même au niveau des sujets, des textes, même si c’est en anglais, je suis en train de repasser à travers une autre passe de Bob Dylan, j’ai tellement trop écouté de Bob Dylan dans ma vie mais je suis encore en train de retomber là-dedans (rires). Il y a beaucoup d’influences, beaucoup de trucs des années 1970 quand même.

 

Myriam : Quel est votre processus de création?
Rémi : Souvent, je suis chez nous tout seul de mon côté, j’ai des idées de chanson; soit des idées de textes ou des idées de riff, et je vais écrire ou composer le squelette d’une chanson. Des fois les paroles au complet, des fois un début, une idée, un refrain ou un couplet puis on se rencontre avec le groupe et on va brasser les idées, essaie de trouver des grooves, travailler les arrangements, on fait des aller-retour comme ça, on met de la chair autour de l’os. C’est vraiment en groupe que la chanson prend de l’expansion. On est tous pas mal impliqués dans le processus créatif, tout le monde donne ses idées sur les parties de tout le monde. Si on est en train de regarder les parties de guitare, ça ne sera pas juste Karolane ou moi qui donnons notre opinion, le groupe est impliqué, ça peut être le bassiste qui va nous dire ce qu’il pense. On a de grosses discussions de cuisine un peu. […]

Myriam : Comment ça se passe cette expérience-là à sept dans un groupe ?
Rémi : Ça se passe bien. C’est sûr que ce n’est pas très commun à notre époque d’avoir un groupe à sept musiciens. C’est un peu à géométrie variable en ce sens où tout le monde a ses implications dans tels ou tels dossiers ou telles ou telles activités de plus. Ça prend de la patience, de l’écoute et de la bonne communication. Ce sont des défis humains comme n’importe quel projet qui demande de travailler avec beaucoup de monde. C’est un projet artistique, ça appelle à de la sensibilité. Il faut que tout le monde y mette du sien, il faut être de bonne foi. Les difficultés sont compensées, je pense, par des moments de groupe, quand ça va bien, qu’on fait un spectacle en gang, qu’on va enregistrer un album, qu’on a des buzz, de partager ça en grosse gang, c’est incroyable, c’est d’autant plus le fun.

 

Myriam : Tu parles de gros buzz, j’imagine que quand vous avez été demi-finaliste des Francouvertes ou que vous avez été prix du public au Festif! De Baie-Saint-Paul, ça a dû être des gros événements dans votre carrière. Qu’est-ce que vous ont apporté concrètement ces deux expériences-là?
Rémi : Cette année-là, si on veut, c’est un peu notre année concours. On s’était dit qu’on allait essayer, on a appliqué à ces deux concours. Ça s’est bien passé, on a été agréable surpris par la réaction du public et des jurys des concours. Ce que ça nous a apporté concrètement c’est qu’on a signé un contrat de disque avec Audiogram suite aux Francouvertes. C’est les Francouvertes qui ont permis d’être découvert par cette maison de disque là et qui nous a permis de commencer à travailler avec eux. Audiogram ont des moyens et du savoir-faire. C’est une belle gang, ils nous ont permis d’enregistrer notre premier album qu’on a sorti cet automne. […] On fait de la musique old school, on utilise des instruments vintages. Ce n’est pas une musique qui peut se faire à faible coût. Il faut quand même s’asseoir, aller en studio, avoir un bon studio, du bon matériel, un ingénieur de son, etc. Travailler avec Audiogram, ça nous a permis d’avoir les moyens de nos ambitions et d’enregistrer un album dans des conditions excellentes, de travailler avec des machines à ruban magnétique pour enregistrer entre autres, de prendre le temps de réaliser l’album qu’on voulait réaliser dans les détails. Ça nous a permis aussi de travailler avec un réalisateur avec qui on voulait travailler depuis longtemps, Warren C. Spicer, le chanteur de Plants and Animals, un groupe de indie rock montréalais. Il travaillait dans beaucoup projets qu’on aime, on aimait son son, sa manière de travailler. On a été chanceux de travailler avec lui. Il a réalisé notre album avec beaucoup de créativité, il y avait une bonne communication entre le groupe et lui. Vraiment, c’était une belle expérience! Tout ça a découlé des Francouvertes, ça nous a ouvert des portes dans l’industrie.

Myriam : Tu viens de parler de l’enregistrement, mais comment s’est passée la création de l’album?
Rémi : Ça s’est bien passé, c’était vraiment cool la vibe honnêtement, c’était très live, on a enregistré l’album presque tout live, tous les musiciens dans la même pièce qui jouent en même temps, en opposition au track by track où tu mets des pistes par-dessus l’autre. Il y en a eu un petit peu des pistes qu’on a rajouté en post-prod. Ça a été enregistré live. C’est difficile de ne pas avoir une bonne vibe dans un contexte comme ça. Dans un beau studio comme le Mixart, qui est un studio à NDG. C’est un studio incroyable avec du bon stock, la vibe est bonne, l’ambiance est cool. On a passé du bon temps franchement. On jouait, on tripait, on écoutait les pistes, tout le monde participait à la création, pitchait des idées, on se faisait de bons repas en groupe après avec la gang du studio. C’était vraiment cool, j’en garde de très bons souvenirs. D’un point de vue artistique, les pièces qui sont sur l’album sont un mélange entre de vieilles chansons que ça faisait longtemps qu’on jouait, qui étaient matures et prêtes à enregistrer mais qu’on n’avait jamais enregistré pour la plupart sauf une chanson qu’on avait déjà sortie sur un EP, qu’on a refaite avec un autre arrangement. À part ça, on a amené à la dernière minute de nouvelles chansons, ça a été une bonne idée de faire ça parce que la magie du studio a opéré. Il y a un buzz le fun quand tu amènes une nouvelle chanson et que tu la déposes à la dernière minute, c’est excitant, tout le monde donne des idées, ça a donné de bonnes chansons pour l’album à mon avis.

Myriam : Qu’est-ce qui vous attend en 2021?
Rémi : Oh mon dieu! Bonne question ça! Pour le moment on a quelques dates de prévues, donc on va voir si c’est possible, ça va dépendre de l’évolution de la pandémie évidemment. Mais sinon, on travaille sur des projets pour faire de la promo vidéo, il va y avoir des trucs à suivre, à annoncer. Je ne peux t’en annoncer en ce moment parce que la situation actuelle complique toutes les choses mais on travaille sur des trucs. (rires)

Myriam : Si tu pouvais prendre ma place de journaliste pour une question, quelle question te poserais-tu, en y répondant?
Rémi : Je ne pense pas souvent à m’interviewer moi-même dans la vie… je demanderais c’est qui l’artiste québécois que j’écoute le plus en ce moment?
Ma réponse serait Antoine Corriveau. J’ai vraiment tripé sur son dernier album. Je ne le connaissais pas beaucoup et son dernier album… j’avais écouté ses albums un peu, mais son dernier album j’ai vraiment accroché, il y avait vraiment quelque chose, j’ai trouvé que c’était un album super touchant, j’ai tripé sur les ballades, ça se donne, c’est très solide. Je le recommande!

1. Ton lecteur de musique plante sur une île déserte, tu peux seulement écouter une chanson, c’est laquelle?
R : It’s Ecstasy When You Lay Down Next To Me, Barry White
2. Ta chanson de rupture préférée?
R : Je suis venu te dire que je m’en vais, Serge Gainsbourg
3. Ta chanson d’amour préférée ?
R : Pale Blue EyesThe Velvet Underground
4. Un.e artiste que tu aimerais que les gens connaissent davantage ?
R : Blaze Foley (mais y’a plein de monde qui le connait! haha)
5. Si tu pouvais écouter un seul album pour l’année à venir, ce serait lequel?
R : Angola 72/74, Bonga
6. La chanson qui te rend le plus heureux ?
R : Thinking of You, Sister Sledge
7. Un.e artiste / groupe qui t’inspire beaucoup ?
R : The Band
8. La chanson qui t’obsède en ce moment?
R : Changing of the Guards, Bob Dylan
9. Une chanson que tu aimerais avoir écrite?
R : Kid Brodeur, Richard Desjardins
10. Ta chanson (à toi en tant qu’artiste) préférée?
R : Ville fantombe
https://www.youtube.com/watch?v=D6JH9m4iXdA&ab_channel=Audiogram