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Les innocentes : une histoire percutante

Jusqu’où peut aller la foi?

soeurs© Anna Wloch. Courtoisie de 2015 MANDARIN CINEMA AEROPLAN FILM MARS FILMS. / Métropole

Par : Anny Lemire

La Deuxième Guerre mondiale est surtout reconnue pour les horreurs qu’a infligés Hitler à la race humain. On a également entendu parler du programme Lebensborn qui consistait à créer des bébés parfaits, représentatifs de la race utopique du célèbre dictateur. Ce qui est moins documenté par contre, ce sont les supplices qu’a vécus une congrégation de soeurs religieuses polonaises à la fin de la guerre.

Se basant sur le journal intime de Madeleine Beaulieu, une médecin française de la Croix-Rouge qui œuvrait réellement en Pologne dans les années 1930-1940, Anne Fontaine (Coco avant Chanel) a créé un long-métrage percutant relatant les événements dérangeants, qui a été présenté à la 32e édition du festival du film de Sundance plus tôt cette année.

mathilde© Anna Wloch. Courtoisie de 2015 MANDARIN CINEMA AEROPLAN FILM MARS FILMS. / Métropole

En avril 1935, l’armée soviétique envahit le couvent des Bénédictines et forcent ses occupantes à des relations sexuelles non consentantes. Honteuses, elles font tout pour le cacher, mais dès que les complications liées à la grossesse des femmes arrivent, une religieuse va secrètement chercher de l’aide à la Croix-Rouge. C’est là qu’elle trouvera Mathilde Beaulieu (Lou de Laâga), une jeune infirmière française, qu’elle suppliera de l’aider. Refusant aux premiers abords, Mathilde change ensuite d’attitude et décide de prêter main-forte à la congrégation. Une fois sur place, elle sera repoussée par la Mère Abesse (Agata Kulesza) qui tient mordicus à son secret. Mathilde essaie de convaincre la Mère Supérieure que son aide est nécessaire et mettra au monde le premier bébé. Par la suite, elle reviendra régulièrement dans le plus grand des secrets s’occuper des sept femmes enceintes.

Plongée dans un jeu de couleurs quasi monochromes, l’image est d’une pureté. Les couleurs plus ternes du couvent contrastent fortement avec celles de la neige à l’extérieur, rappelant le conflit intérieur que chaque bénédictine doit subir quotidiennement. En effet, comment vivre avec une grossesse avancée alors que pour la plupart, elle ne savent rien des enfants. Cette situation apporte également son lot de questions existentielles telles : Comment faire pour garder la foi quand un tel événement se produit? Faut-il faire fi de nos valeurs dans une telle situation? Quels sont les choix moraux d’une situation pareille? J’ai également trouvé intéressant l’opposition des religions (Mathilde est athée) et des points de vue divergents entre ceux-ci. Finalement le jeu des acteurs devant un tel défi est impeccable, et les émotions sont partagées avec efficacité. Lou de Laâga est simplement parfaite dans ce rôle, elle brille autant à l’écran que dans la vie des soeurs.

Mettant aussi en vedette Agata Buzek et Vincent Macaigne, cette oeuvre cinématographique est d’une actualité choquante puisque les viols de guerre sont encore une réalité brutale pour les pays africains et en Haïti. Cru, vif, et réfléchi, ce film doit être vu, partagé et discuté!

Le film est en salle au Québec depuis le 19 août 2016.

Note : 4/5

Texte révisé par : Annie Simard