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Le poignant théâtre musical de Geneviève Leclerc

Un portfolio classique qui réserve des surprises

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© Véronyc Vachon/MatTv

Par : Marie-Claude Lessard

Candidate lors de la quatrième saison de La Voix, la chanteuse et comédienne Geneviève Leclerc a convoqué, le 13 novembre dernier, journalistes, famille et amis pour sa rentrée montréalaise au Cabaret Lion d’Or, scène qu’elle a jadis foulée pour son spectacle de graduation alors qu’elle était étudiante en théâtre musical au Collège Lionel-Groulx. Avec la tournée entourant Portofolio, son premier album solo regroupant grands succès et chansons originales (les bouleversantes Limpide et Mon indispensable), la Gatinoise entreprend une impressionnante opération séduction dans laquelle le public a la chance de connaître plus en profondeur une interprète émotivement investie dotée d’une technique vocale irréprochable.

Débutant le dos tourné à la salle comble, son incontournable queue de cheval bien en évidence, celle qui fera partie de la distribution de la revue musicale Cocktail cet été, à l’Assomption et à Victoriaville, a entamé Calling You, pièce tirée du film Bagdad Café. Cette entrée en matière alliant douceur, fragilité et art dramatique a magnifiquement donné le ton à la soirée. D’ores et déjà, Geneviève Leclerc imposait sa voix puissante teintée d’émotions brutes et vulnérables qui ne peut faire autrement que de procurer des frissons. Le public a apprivoisé avec bonheur l’artiste grâce à son immense talent, mais aussi à cause de sa simplicité et son charisme lors de ses interventions charmantes retraçant son parcours et ses expériences marquantes.

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La sélection des 21 chansons, qui englobait un choix assez proportionnel de titres en français et en anglais, revêtait bien évidemment un aspect comédie musicale mais efficacement revisité. Bien qu’intemporelles, des chansons comme L’hymne à l’amour, Je ne regrette rien, Le monde est stone et What’s Up s’avèrent facilement prévisibles et lassantes tellement tous les connaissent par cœur. Or, grâce aux arrangements de Nick Burgess, Geneviève Leclerc a réussi à les faire siennes. Ces appropriations se sont déroulées sans  aucun temps mort. La version jazz de J’attendrai de Dalida , celle presque lyrique de Wicked Game de Chris Isaak et la rafraîchissante Love will keep us together ont particulièrement impressionné. L’artiste voguait dans ce répertoire traitant d’amour et de déchirures passionnées avec une aisance remarquable et saisissante.

Au poste de metteur en scène, René Richard Cyr , qui a dirigé Leclerc dans Les belles-sœurs : The Musical, a réussi à montrer la théâtralité de l’artiste sans bombarder le spectacle d’artifices inutiles. Les numéros dramatiques (l’incontournable et inoubliable Je suis malade en conclusion) et ceux plus légers (Big Spender avec des danseuses s’attaquant au style cabaret) s’enchaînaient avec harmonie. Idem pour la variété soignée et intelligente des déplacements. On a qu’à penser à l’isolement à l’arrière-scène pendant Roxanne au cours de laquelle un couple s’adonnait à de la danse contemporaine, rappelant ainsi le film Moulin Rouge! de Baz Luhrmann. L’adorable duo avec sa choriste Chloé McNeil, qui la regardait avec admiration tout au long du concert, pour les bienfaits de la chanson Happy Days a également attiré l’attention.

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Ceci dit, le véritable clou du spectacle résidait dans l’interprétation du grand succès de Je ne t’aime plus de Mario Pelchat. Au-delà des prouesses vocales, la chanteuse tremblait de tous ses membres sous le poids de l’émotion. Grâce à son regard perçant, ses petits rires judicieusement placés, elle vivait chaque intention derrière le texte. Lorsqu’elle scandait à répétition « Je ne t’aime plus », le public ressentait avec clarté la réalisation de ce sentiment renversant. Pendant le concert, la vedette a révélé que les personnages se mettent à chanter lorsque les émotions sont trop importantes pour s’illustrer uniquement sous forme de dialogues. C’est ce qu’elle a magnifiquement prouvé avec sa personnalité et son talent qui, heureusement, n’ont point encore dévoilé toutes leurs facettes.

Crédit photo : © Véronyc Vachon/MatTv.ca
Texte révisé par : Johanne Mathieu