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Internet au temps médiéval : Les Bâtards

Entrevue avec le réalisateur Gabriel Bissonnette

HELGA

©Courtoisie

Par Maxime D.-Pomerleau

Si ce week-end dernier ça fêtait fort aux Rendez-vous du cinéma québécois, plusieurs réalisateurs travaillaient, à mettre la touche finale à leur dossier pour le Fonds Indépendant de Production, l’une des seules institutions à financer de manière importante les projets de webséries. C’est le cas du réalisateur Gabriel Bissonnette, qui souhaite voir un jour son projet Les Bâtards en ligne. Je me suis entretenue avec lui pour avoir en connaître davantage sur cette bande de personnages surprenants sortis d’un autre monde et avoir sa vision d’une industrie en pleine croissance, qui reste toutefois difficile à percer.

« Je crois que nous sommes dans une ère de changement et c’est exactement ce que le web a apporté dans nos vies, dit le réalisateur. La façon d’écrire, la façon de produire et le contenu toujours de plus en plus jeune, déjanté et frais respirent sur le web. C’est pourquoi j’apprécie le format du web qui se permet une belle exploration de tous les univers. Je pense que le web va de plus en plus dicter et influencer le contenu à la télévision et au cinéma. »

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Comme plusieurs réalisateurs et scénaristes à la carrière prometteuse, Gabriel Bissonnette considère le web comme un formidable tremplin pour les jeunes réalisateurs qui souhaitent un jour réaliser un long-métrage, la fiction sur le web étant un portail de création unique et différent. « Cette liberté est possible grâce à des fonds de soutien majeurs tels que TV5 et le FIP. Ce sera grâce à ces institutions si le projet Les Bâtards prend réellement vie. Si les subventions sont au rendez-vous, nous allons entamer la production dès l’été 2015. D’ici là, on doit faire circuler notre bande-annonce le plus possible pour convaincre les institutions de la popularité et de la pertinence de notre projet. »

C’est en 2013, après avoir réalisé son premier film médiéval fantastique, Miserra, que Gabriel a senti le besoin d’explorer encore cette époque. Après une  diffusion aux Rendez-vous du cinéma québécois, à la Station Vu et à Fantasia, les spectateurs avaient tous le même discours : ils en auraient pris davantage. Produire une websérie lui permet donc d’approfondir cet univers qui le fascine depuis toujours. « Miserra a été pour moi un premier tremplin pour le projet Les Bâtards. J’ai grandi avec les Star WarsLabyrintheLord of the Rings et j’ai toujours été fasciné par l’aventure d’un groupe qui lentement se forme et tente de sauver l’humanité. Le pouvoir unique de la science-fiction et du médiéval, c’est de nous transporter dans un univers qui nous est lointain ou inexistant. Le cinéma pour moi sert à voyager, à rêver et à s’oublier. »

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Comment s’est déroulé le tournage du pilote des Bâtards?

« Grâce à une équipe passionnée, dynamique et impliquée, le tournage du pilote s’est super bien passé. Sans eux, et sans la campagne de sociofinancement avec Ecloid, nous n’aurions jamais réussi à réaliser un pilote d’une aussi bonne qualité. Le projet n’a pas toujours été simple, puisque je voulais faire quelque chose d’impressionnant, mais après coup je suis vraiment fier de ce que nous avons accompli. »

 

Tu bénéficiais seulement de 3000 $ de budget pour tourner le pilote de ta websérie. Quelles ont été les principales contraintes que tu as rencontrées dans la production?

« Tout d’abord, puisqu’il s’agissait d’un projet bénévole, on a eu à jongler entre les horaires des comédiens, des techniciens et des figurants pour planifier l’horaire de tournage. De plus, puisque le tournage avait lieu à Saint-André-Avellin, on devait planifier le voyagement de toute l’équipe et le matériel de production, ce qui a été assez ardu, mais puisque j’avais une bonne équipe tout le monde à été très coopératif. Enfin, les contraintes de temps et d’argent se sont fait ressentir dans les décors, les armures et les costumes, mais l’équipe de tournage était prête à s’investir gratuitement dans le projet, puisque tous le portaient en eux. Je suis super fier du travail colossal que nous avons accompli avec les ressources à notre disposition. »

 

Les images que l’on peut voir en ligne sont d’une très grande qualité. Parle-nous de la direction artistique de ces deux projets.

« Pour Les BâtardsAudrey Lorrain et Catherine Lafortune ont fait un travail extraordinaire. Ensemble, et avec bien sûr plusieurs bénévoles, elles ont réussi à transposer les idées en images. Je leur avais donné comme mission de faire ressentir aux spectateurs que nous étions dans un environnement hostile, dans un univers d’apparence historique médiévale, tout en créant quelque chose d’original se rapprochant de ma vision. »

 

Pour le public qui est peu familier avec l’industrie du cinéma, peux-tu décrire comment se passe un tournage comme celui des Bâtards?

« Le cinéma est l’art qui coûte le plus cher à produire. Bien sûr quand on regarde le résultat final, on a l’impression qu’il n’y a que quelques personnages, mais ce n’est qu’une illusion, et c’est là en fait toute la magie du cinéma! Sans énumérer tous les postes, ça prend des comédiens, et toute une équipe technique au service de l’œuvre; des maquilleurs, des coiffeurs, des assistants dans pratiquement tous les départements, des figurants, des cantiniers, des musiciens, un mixeur sonore, bref beaucoup de gens pour finalement quelques minutes à l’écran. Sans compter tout le temps de préparation, avant même de commencer le projet. Il faut avoir une idée qu’on transpose en scénario. Ensuite, on fait des auditions pour les rôles, on fait la conceptualisation des costumes et des décors, on doit planifier des lectures avec les comédiens et des pratiques. Une fois qu’on sent qu’on est bien préparé, on passe au tournage pour finir avec le montage et la diffusion. En gros, un projet de quelques minutes peut facilement coûter quelque millier de dollars et demande beaucoup de participants. »

En plus de mener de front Les Bâtards, le réalisateur Gabriel Bissonnette planche aussi sur d’autres projets cinématographiques incorporant l’horreur et le suspense à ses histoires. Celui qui considère que le cinéma québécois a besoin de ses Polytechnique et Mommy mais aussi de films comme Nuit #1 et Sarah préfère la course, pense aussi qu’on doit faire du cinéma de genre. « Je crois qu’il est important de financer notre cinéma et de produire tous genres confondus. »