un magazine web axé sur la culture d’ici

Adieux de La Patère Rose à Coup de cœur francophone

Je t’aime pour longtemps

© Alex Grenier

Par Maxime D.-Pomerleau

Remède éprouvé contre la grisaille de l’hiver qui nous assomme depuis une semaine, le festival Coup de cœur francophone s’est assuré de nous tenir bien au chaud dans les salles du centre-ville avec une programmation à l’image de la scène francophone québécoise; riche, diversifiée, drôle et touchante.

Le dernier week-end de célébrations musicales mettaient en vedette quelques grosses pointures, notamment Marc Déry, Dumas, Stéphane Lafleur, Catherine Leduc, Élage Diouf puis Urbain Desbois, des maîtres de l’underground tels Jardin Mécanique et Les Breastfeeders, une délégation hip hop queb’ avec Lary Kidd, KNLO et Robert Nelson et aussi quelques revenants d’une époque où on achetait encore des CDs dans des magasins; Les Chiens, Les Frères à Ch’val, Vilain Pingouin et nul autre que Noir Silence.

Mais un petit rubis scintillait au travers de cette programmation éclectique : La Patère Rose. Douce commotion causée plus tôt cette année lorsque le groupe avait annoncé se reformer pour quelques spectacles au Québec pour souligner le 10e anniversaire de leur album, dont une une seule date à Montréal, à Coup de cœur. Un ultime chant du cygne pour souligner l’un des albums phares de la décennie.

La Patère Rose, menée par Fanny Bloom avec les Valairiens Roboto et KiloJules, a contribué à forger le son de la mythique scène Sherbrooklyn au détour des années 2010, avec Misteur Valaire, Jérôme Dupuis-Cloutier, Pete Möss, Greenwood, Half Baked et b.e.t.a.l.o.v.e.r.s qui étaient tous sur un erre d’aller qui les mèneraient loin. Avec un album homonyme lancé en 2009 et un EP, Waikiki, paru en 2010, l’électro-pop de La Patère Rose a conquis toute une communauté de mélomanes, au Québec et chez nos cousins Français. C’est donc avec bonheur qu’on les retrouvait samedi dans un Ministère rempli d’une foule intergénérationnelle et étonnamment jeune si on considère que leur comeback a lieu huit ans après leur séparation.

© Alex Grenier

Il fallait avoir attaché son pacemaker avec de la broche car on a fessé fort d’entrée de jeu avec l’épilogue de Chamord-sur-mer (quel paradoxe) tout de suite enchaîné avec L’éponge (MA PREF!!!) puis Pacemaker, Décapote… Les paroles revenaient en tête à chaque pièce redécouverte, signe qu’on a fait tourné le laser des centaines de fois jusqu’à saturation de la mémoire.

On s’offre une petite incursion jazzy dans l’album de Fanny Bloom, notamment avec Liqueur qui est, au fond, une pièce de La Patère déguisée puisque composée avec ses deux acolytes, et quelques « covers back in the days pour remplir le setlist qui ferait juste 30 minutes » puisque le groupe a, rappelons-le, seulement un album et demi à son actif. Après avoir couru dans la foule durant Psycho Killer, la duchesse prit un moment pour souffler, avant de s’attaquer à la tristesse incarnée de Backyard souvenir. Heureusement, le jeu de marelle est venu sauver les plus sentimentaux d’entre nous, au bord de l’effondrement devant la fin inéluctable qui approchait.

Les trois performeurs ont évidemment prit du galon au cours des dix dernières années. Fanny Bloom pétillante et pleine d’assurance, Roboto et KiloJules plus discrets mais engagés dans les mises en scène cocasses du groupe. Que ce soit la fin rock de L’éponge, les effets planants de reverb’ sur plusieurs pièces ou la chorégraphie de nage synchronisée durant Décapote, on était moins collé à l’album que lors de leurs premiers spectacles. Outre les instruments de musique, on voyait beaucoup d’écoute, de plaisir et de complicité sur scène.

© Alex Grenier

Quatre petites minutes sous le soleil de Waikiki avant de nous préparer tranquillement à retourner dans le froid avec Duet Tacet, puis, comme c’était le cas lors de leur concert d’adieu en 2011, Avec toi dedans clôt l’aventure. C’était bon. C’était beau. C’était douloureux. Et comme pour l’autre show d’adieu (attention que ça ne devienne une habitude!) on se rappellera aussi de ce retour flamboyant et humide du trio. Le groupe a creusé un sillon pour permettre à des artistes de la scène indie de s’imposer, mélangeant adroitement les styles et les influences, tant de la chanson française que du classique, de l’électro et de la pop. Il leur a donné cette liberté de jouer, de créer et d’oser, d’écouter ses tripes et ses désirs et de foncer.

Adieu, La Patère Rose.
On reviendra au printemps, et la maison sera toujours là.
Mais tu ne seras plus dedans.

 

Chansons

Chamord-sur-mer-l’épilogue
L’éponge
Pacemaker
Décapote
Chocolove
Chamord-sur-mer
Le tourbillon de la vie (Jeanne Moreau)
Jessicok
Duchesse
Petit Ours
J’ai rêvé
Liqueur (Fanny Bloom)
Jaser jaser (Fanny Bloom)
Psycho Killer (Talking Heads)
Backyard souvenir
La marelle
Pépé
Waikiki
Duet Tacet
Avec toi dedans

#CCF19

Crédit photo à la une : Page Facebook du groupe